Chez l’être humain, le comportement de dessin se développe dès le plus jeune âge, évoluant des simples gribouillis vers des représentations plus concrètes et figuratives. Les gribouillages des plus petits captent souvent notre attention ; cependant, en tant qu’adultes, nous restons souvent perplexes lorsque nous essayons d’analyser leur contenu et de comprendre leur processus de création. Or, le dessin est également un médium fréquemment utilisé dans les entretiens cliniques pour aider les enfants à communiquer leurs expériences, notamment émotionnelles. Sans verbalisation, nous ne pouvons pas déterminer avec certitude quand le dessin commence à avoir un sens pour l’enfant en bas âge ou pour l’enfant qui ne maitriserait pas le langage oral. En l’absence de langage commun, il est difficile de savoir si les dessins d’enfants non-verbaux possèdent des propriétés graphiques et esthétiques et par extension de mesurer le degré d’intentionnalité et de représentativité des enfants dessinateurs.
Pour analyser le développement du comportement de dessin chez l’enfant humain de nouvelles méthodes d’analyse plus objectives ont été éprouvées ces dernières années, à savoir des indices mathématiques basés sur les fractales et l’intelligence artificielle. Nous avons en effet montré que les mesures obtenues par ces deux outils permettaient d’approfondir notre compréhension de la représentativité dans le dessin humain et ce, même si son auteur n’est pas en mesure de donner des explications.
Le projet de recherche KYE@P (2024-2026) vise à pousser l’exploration du comportement de dessin chez les enfants humains non verbaux en élargissant notre palette méthodologique à l’oculométrie (eye-tracking). En effet, un autre mouvement qui semble intéressant d’étudier, notamment pour approfondir la question de l’intentionnalité de l’enfant qui dessine, est le suivi de son regard. Le suivi oculaire s’est développé ces dernières années notamment grâce aux avancées technologiques qui permettent non seulement de définir et d’enregistrer des évènements très rapides, mais aussi de pouvoir les analyser et les interpréter en termes de processus cognitifs et/ou émotionnels tels que l’attention de l’individu au cours d’une tâche, le traitement de l’information reçue ou encore le changement de motivation de l’individu. Une telle lecture « biologique » de la production, sans a priori, pourrait nous éclairer sur ce que l’enfant souhaite, ou non, faire voir.
Le projet KEY@P est financé par l’Université de Strasbourg grâce à un financement IDEX.
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